by Stéphan Levesque | Jan 29, 2014 | Articles Divers/Primeurs/Annonces, Chroniques, Critiques, Critiques d'Albums, Les "Elles" du Métal

Lorsque l’on demande aux amateurs de musique de nommer un groupe de metal symphonique avec chanteuse, nous avons neuf chances sur dix d’obtenir Nightwish ou Within Temptation comme réponse. La raison en est fort simple, ces deux formations ont su combiner inventivité et accessibilité pour se gagner une légion de fans afin de s’imposer comme les plus gros canons de ce genre musical.
Si c’est l’évolution humaine de Nightwish qui a beaucoup fait jaser ces dernières années (deux changements de chanteuses dans des circonstances relativement controversées), c’est plutôt l’évolution musicale qui provoque des discussions chez les fans de Within Temptation en raison de la tangente de plus en plus commerciale prise par sa musique. Preuve irréfutable de ce virage, la page Facebook officielle du groupe indique que celui-ci se classe dans le style symphonic rock, alors qu’il est d’usage de classer Within Temptation comme étant un groupe de metal symphonique. La publication récente de Hydra, sixième album studio du groupe néerlandais, dont la critique vous sera proposée en fin de dossier, continue d’alimenter la discussion.
Les fans de metal doivent donc se poser la même question que les fans de rock progressif continuent de se poser depuis tant d’année au sujet de Genesis: Within Temptation progresse-t-il artistiquement ou a-t-il simplement vendu son âme de manière opportuniste au nom d’un carriérisme destiné à vendre le plus grand nombre d’albums possibles? Tout comme dans le cas de la troupe de Phil Collins et Peter Gabriel, la réponse à cette question n’est pas si simple. Afin d’y voir plus clair et d’élaborer sur la question, cette chronique des Elles du Metal s’attaque au cas Within Temptation en vous proposant, en deux parties, une discographie commentée de la carrière de ce groupe majeur.
Des débuts gothiques
C’est en 1996, sur les débris du groupe The Circle, qu’est fondé Within Temptation par le guitariste Robert Westerholt et sa conjointe, la chanteuse Sharon den Adel. Se joignent à eux le claviériste Martijn Westerholt (le frère de Robert), le bassiste Jeroen van Veen, le guitariste Michiel Papenhove et le batteur Dennis Leeflang (le premier de huit individus ayant tenu les baguettes chez Within Temptation).
À l’écoute de ce que le groupe produit aujourd’hui comme musique, il est surprenant de constater que son premier album, Enter, publié en 1997, est grandement imprégné d’une ambiance gothique. Enter est en effet un album typique de ce mouvement musical, misant sur les guitares lentes et lourdes et les ambiances mélancoliques, complété par ce mélange de vocaux clairs et de grunt, plus communément connu sous l’appellation « Beauty and the Beast« . Le rôle de Beast en question est tenu par Robert Westerholt, qui ne s’aventurera guère sur ce terrain dans les années futures (il reprendra ce rôle sur l’excellente Jane Doe, une chute des sessions d’enregistrement de Mother Earth, qui apparaîtra aussi sur une édition limitée de The Silent Force) et par George Oosthoek (ex-Orphanage), invité sur la pièce Deep Within et qui répondra de nouveau à l’appel en interprétant The Other Half (Of Me) paru sur The Dance, EP qui s’inscrit dans la continuité de Enter, lancé l’année suivante.
Sans innover, Enter est bien reçu par la critique et contribue à faire connaître Within Temptation chez lui, aux Pays-Bas. La plus belle qualité de ce dernier est qu’il sait combiner des éléments symphoniques que l’on retrouvera en grande pompe sur ses successeurs à des éléments gothiques similaires à ce que l’on retrouve chez des groupes comme Theatre of Tragedy ou Tristania. Malgré la présence de bons moments comme Restless et Candles (ce titre resurgira sur certaines rééditions de Mother Earth), Within Temptation ne fait pas preuve d’un talent ou d’une originalité particulier. Il faut donc approcher ce premier pas discographique pour ce qu’il est, c’est-à-dire la première brique d’un édifice dont l’architecture n’est pas encore bien définie.
L’explosion symphonique
L’année 2000 ne marque pas seulement un changement de siècle pour Within Temptation, elle s’avère surtout une [première] transformation de fond en comble de sa sonorité. Les claviers, discrets mais efficaces sur Enter, explosent sur Mother Earth. Fini les nappes ambiantes et le piano en accompagnement de la voix, Within Temptation passe au mode symphonique et s’affaire à reproduire un son qui se rapproche le plus possible de celui d’un véritable orchestre. Le résultat saute aux oreilles dès le début de l’album, la pièce-titre s’avérant une entrée grandiose et un brin pompeuse, caractéristique typique au metal symphonique. Ayant fait preuve de la belle étendue de sa voix sur le premier album, on constate aussi que les capacités vocales de Sharon den Adel seront utilisées à meilleur escient sur ce deuxième essai; si elle ne possède pas la puissance d’une Heidi Parviainen (Dark Sarah, ex-Amberian Dawn) ou d’une Lori Lewis (Therion), elle réussit à s’illustrer grâce à sa voix aigüe et claire et se retrouve destinée, en vertu de sa présence généreuse et charismatique et de ses tenues flamboyantes sur scène (la dame dessine elle-même ses robes), à devenir le visage du groupe.
Au Bénélux, Within Temptation se retrouve presque instantanément propulsé au rang de formation majeure en raison de la chanson Ice Queen – devenue depuis un classique de ce genre musical -, à la fois accrocheuse et très riche au niveau sonore, qui grimpe jusqu’au deuxième rang du palmarès aux Pays-Bas et au troisième rang en Belgique*. Transporté par ce titre, Mother Earth arrivera à se hisser au troisième rang des charts dans ces deux pays. Il faut dire que ce deuxième album ne manque pas de charme et de variété, mélangeant habilement les morceaux plus orchestraux (outre la pièce-titre et la susnommée Ice Queen, Deceiver of Fools, Caged et particulièrement The Promise sont tout aussi explosives) aux morceaux plus doux et relaxants, les très beaux Never-Ending Story, In Perfect Harmony et Our Farewell, ce dernier ayant été lancé en single mais n’ayant pas pu se faufiler dans les palmarès malgré toute sa joliesse.
En conséquence, ce deuxième album est presque généralement acclamé par la critique, Within Temptation parvenant à se tailler une place chez les grands. Ce dernier s’avère non seulement une réussite totale, mais également un album original, défricheur et innovateur. Si l’utilisation des claviers passe au premier plan, ces derniers ne sonnent en rien comme ceux des autres groupes du même style, confirmant que les Néerlandais possèdent un son qui leur est propre. Ce ne serait pas exagéré de prétendre que Mother Earth est un album fondateur dans le sens où une quantité indénombrable de jeunes groupes ont, depuis ce temps, tenté de reproduire – avec un taux de réussite variable – ce son énorme qui nous donne l’impression qu’on se retrouve en présence d’un véritable orchestre symphonique. Bref, Mother Earth est l’exemple sonore parfait de ce qu’est le metal symphonique.
Un léger vent de changement
Fort du succès de Mother Earth, Within Temptation sera très actif sur scène jusqu’en 2004, date de parution de son troisième album, The Silent Force. À la fin de 2001 deux changements majeurs d’effectifs se sont produits à l’intérieur du groupe: tout d’abord le remplacement de Martijn Westerholt par Martijn Spierenburg aux claviers, et ensuite l’arrivée de Ruud Jolie à la guitare en remplacement de Michiel Papenhove. Si ce dernier n’a pas été revu sur une scène depuis, Martijn Westerholt qui avait quitté Within Temptation en raison de problèmes de santé est depuis ce temps revenu à l’avant-plan en fondant Delain, un groupe dont le succès continue de croître, avec la chanteuse Charlotte Wessels.
Ce changement aux claviers marque une légère transformation de la sonorité du groupe. Même si Spierenburg, pas davantage que son prédécesseur, n’est crédité au chapitre de la composition, il est évident que le nouveau venu s’est amené avec sa propre palette, les claviers se faisant plus luxuriants et rappelant davantage une chorale qu’un orchestre. Celui qui s’attarde à cet aspect spécifique de la musique de Within Temptation constatera une sonorité plus ambiante, mais comme celle-ci est parfaitement contrebalancée par des guitares plus lourdes et une production remarquable, The Silent Force réussit à sonner plus « gros » que son devancier. Grâce à cet album, Within Temptation réussira encore à augmenter son audience et se hissera au top 5 dans le palmarès de quatre pays: #1 aux Pays-Bas, #3 en Finlande, #4 en Belgique et #5 en Allemagne.
La nouveauté la plus notable amenée par The Silent Force, c’est la simplification du propos. En effet, Within Temptation abandonne le format long qui lui a bien réussi depuis ses débuts (Restless, Candles et presque tous les titres de Mother Earth dépassaient les cinq minutes) et rend ses chansons plus potentiellement attrayantes pour la radio en raison de leur plus courte durée et de l’omniprésence de la voix de Sharon den Adel, les passages instrumentaux étant plus limités. Il ne serait donc pas erroné de prétendre que Within Temptation a, à partir du succès surprise de Ice Queen, tenté de reproduire cette formule afin de rejoindre un public plus large.
Malgré cette tentative, il serait toutefois erroné de qualifier The Silent Force de « commercial« , les compositions se faisant complexes dans leur ensemble (particulièrement See Who I Am et Forsaken, deux pièces très puissantes qui n’auraient pas déprécié la valeur de Mother Earth) et n’étant pas délibérément orientées vers la radio, malgré quelques incursions sur ce terrain avec Angels (top 10 aux Pays-Bas et en Finlande) et surtout avec l’incontournable Stand My Ground (un autre classique des Néerlandais, #1 en Espagne et #4 aux Pays-Bas). Reconnaissant le potentiel de cette dernière, Sony BMG l’inclura sur le pressage américain de The Heart of Everything afin d’inciter le public nord-américain à découvrir les trois premiers albums du groupe; Mother Earth et The Silent Force seront d’ailleurs lancés en édition américaine en 2008. Si le début du succès commercial de Within Temptation date de la publication de Ice Queen, c’est véritablement sur The Silent Force que l’on peut trouver les origines du virage des Néerlandais, ceux qui savent lire entre les lignes (ou entre les notes) pourront le constater.
En date de 2004, ayant publié trois albums, Within Temptation est parvenu à combiner habilement musique complexe et musique accrocheuse, lui ouvrant la porte à une popularité de plus en plus notable en Europe de l’Ouest. On peut donc affirmer sans se tromper que la formation s’est alors retrouvée face à un dilemme: revenir aux sources symphoniques et gothiques pour consolider le public en place ou tenter de rejoindre de nouveaux auditeurs (notamment sur l’énorme marché nord-américain) en faisant évoluer sa musique dans une autre direction. Au moment où se termine la première moitié de ce dossier, nous avons donc devant nous des musiciens qui sont conscients de leurs capacités à rejoindre un large public grâce à sa facilité de produire une musique riche et variée. Le mystère plane, quelle direction prendra Within Temptation?
*Les données énumérées dans ce dossier concernant les performances au palmarès sont tirées de Wikipédia.
Stéphan Lévesque
by Stéphan Levesque | Jan 29, 2014 | Critiques, Critiques d'Albums, Les "Elles" du Métal


Tears of Martyr
« Tales«
Massacre Records
2013
Si je vous mentionne les Îles Canaries, vous pensez à vos prochaines vacances, n’est-ce pas? Toutefois, ici je ne vous parlerai pas de voyage mais bien de musique alors que je vous présente Tears of Martyr, une formation originaire de ces îles situées dans l’océan Atlantique à environ 1500 km des côtes du Maroc. Après avoir lancé son premier album, Entrance, en 2009, Tears of Martyr s’est fait connaître en tournant entre autres avec Epica et Draconian. Plus récemment, la formation maintenant installée à Madrid (les Canaries sont une possession espagnole) s’est produite avec Sorronia et Xandria pour présenter au public son nouvel album, Tales.
Pour les amateurs de comparaisons, Tears of Martyr évoque fortement deux formations néerlandaises: Epica et After Forever. On retrouve effectivement beaucoup d’éléments typiques de ces groupes bien connus, entre autre au niveau du style musical similaire suggéré, c’est-à-dire un metal symphonique très rythmé où l’on peut flairer des influences death. Cette comparaison est renforcée en raison de l’utilisation de la formule vocale beauty and the beast, soit l’imbrication d’une voix féminine claire avec une voix masculine gutturale. Vous comprendrez donc que Tears of Martyr ne réinvente pas le pain tranché (je vous le demande, qui innove encore de nos jours?) en utilisant une formule bien connue, mais le tout est livré avec efficacité et c’est ce qui compte.
Si la première pièce, The Scent No. 13th, est une entrée symphonique somme toute agréable mais conventionnelle, on se laisse pleinement entraîner dans l’album à l’écoute de l’extrait suivant, le « single » Golem; cette pièce réussit à synthétiser en quatre minutes ce que le groupe a de mieux à nous offrir, c’est-à-dire une musique chargée (la comparaison avec Epica prend ici tout son sens) bien agrémentée d’une partie plus calme afin d’installer une ambiance nuancée. Le mélange des voix y est agréable, le growl intense – mais jamais agressant – est bien exécuté par Miguel Angel Marques (il est aussi le guitariste) et se marie parfaitement à la puissante voix de Berenice Musa, qui en raison de sa richesse pourra nous rappeler Floor Jansen ou Tarja Turunen. On découvre ensuite sur la très belle Mermaid and Loneliness que Tears of Martyr sait jouer sur un autre tableau, celui des balades.
Jusqu’à présent, trois chansons, trois ambiances, et c’est là la principale force de cet album: la routine ne s’installe jamais en raison de la grande variété de la musique offerte tout au long de la quarantaine de minutes que dure le parcours. Afin de garder l’auditeur captif, les Espagnols alternent habilement entre des tempos rapides et lents d’une pièce à l’autre, l’insertion de la très belle interlude folk acoustique Ancient Pine Awaits entre deux morceaux plus musclés démontrant la réussite de cette dynamique. Cette dernière pièce vient également démontrer que Marques sait aussi faire preuve d’une belle retenue lorsque vient le temps de chanter de façon « normale ». Tears of Martyr se retrouve donc avec deux chanteurs à la voix souple, permettant de compléter leur variété musicale par une belle variété vocale, comme on peut ultimement le constater sur l’enlevante Of A Raven Born, pièce hautement symphonique ponctuée à la fois de chant de style opéra, de growl et de chant masculin conventionnel.
Tel que mentionné plus haut, Tales n’est pas un album révolutionnaire mais il s’affirme en raison de sa grande variété au niveau des compositions et de la qualité des musiciens et des chanteurs. La production, très claire, permet de distinguer toutes les composantes de la musique. Bref, tous les éléments sont réunis pour une écoute plus que satisfaisante.
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Azylya
« Sweet Cerebral Destruction«
Wormhole Death
2012
Vous est-il déjà arrivé, dans la vie, de penser que vous allez détester une personne pour ensuite l’apprécier fortement? En musique, la même chose peut se produire alors que certains signes nous indiquent que l’on écoutera un album une ou deux fois, pour la forme, et que finalement on se rend contre que ce dernier se retrouve régulièrement dans le lecteur CD car on s’y est attaché contre toute attente. C’est exactement ce qui s’est produit dans mon cas avec le premier album du groupe gothic belge Azylya, Sweet Cerebral Destruction.
Premier élément qui jouait contre l’album nommé ci-haut : le sujet. Sweet Cerebral Destruction, c’est l’histoire de la petite Ginger, presque sept ans, qui à la suite du décès de sa mère est abusée par son père. Ce dernier, pour éviter le scandale, fini par l’abandonner dans un hôpital psychiatrique, nommé Azylya, où règne une atmosphère de terreur et de violence. L’album raconte les tribulations de la jeune fille entre les murs de cet institution où il ne fait pas très bon vivre. Étant porté vers le côté positif des choses et voyant davantage la musique comme un vecteur de rêve, je n’étais pas a priori enclin à vouloir me concentrer sur un tel récit. Pourtant, l’adjonction d’un propos musical en parfaite symbiose avec la trame narrative rend l’écoute de l’album passionnante et on se surprend à se laisser embarquer dans l’histoire.
L’autre élément qui était susceptible de me repousser est la forte présence de growl. Force est toutefois d’admettre que cette composante est ici fort à propos, étant donnée la gravité du sujet abordé. L’histoire est si sombre que la voix de Yohann Gaucher, glauque et sinistre à souhait, – bien qu’enregistrée de manière trop « sale », ce qui peut être parfois agressant à l’oreille – s’avère une nécesssité et complète à merveille la voix fragile et émotive de Jamie-Lee Smit, l’auteure de l’histoire, qui sait exprimer de manière convaincante les peurs et angoisses de la petite Ginger. Vous comprendrez donc que Sweet Cerebral Destruction n’est pas un album conventionnel, c’est un tout que l’on écoute en s’imprégnant de l’ambiance de terreur bien portée par les interprètes, autant au niveau vocal que musical.
Si la complémentarité entre les vocalistes est remarquable, les musiciens ne sont pas relégués au second plan. L’aspect performance n’est pas mis en relief ici, – c’est très rarement l’objectif recherché par les groupes de gothic metal – les instrumentistes mettant leurs talents au service de l’histoire et de l’ambiance dégagée par celle-ci. Les claviers, entre autres, jouent un rôle particulièrement efficace dans la création de cette atmosphère inquiétante. La palette sonore de ces derniers est bien élaborée et l’utilisation judicieuse du piano ici et là contribue à donner une touche lumineuse à certains passages. Les meilleures pièces s’avèrent être Incest, qui avec son tempo lent en début d’album, installe l’ambiance, ensuite Electroconvulsive, pièce rythmée ponctuée d’une belle passe d’armes entre la guitare et le piano, et finalement Rise of the Wicked, à la conclusion plus douce qui nous laisse une touche positive en fin de parcours.
Au final, Sweet Cerebral Destruction s’avère être une belle fresque unitaire qui s’écoute sans ennui d’une seule traite; cet album est surtout une belle réussite pour un jeune groupe à son premier essai. Après avoir eu beaucoup de temps pour préparer son entrée, – les premières ébauches de l’histoire datent de 2007 – il sera intéressant d’entendre comment Azylya réussira à se surpasser maintenant qu’il a réussi à nous surprendre de belle façon et que certaines attentes se sont maintenant installées. La réponse nous viendra plus tôt que tard alors que le groupe est en plein processus de création pour son deuxième album qui, souhaitons-le, tombera dans les bacs d’ici la fin de la présente année.
by Stéphan Levesque | Jan 25, 2014 | Critiques, Critiques d'Albums, Les "Elles" du Métal

La période des Fêtes est maintenant bien derrière nous et j’en connais qui s’accrochent encore à leur(s) résolution(s) du Jour de l’An, souvent prise(s) après un p’tit verre de trop, sur un coup de tête et surtout souvent à la suggestion (pression) d’un chum/blonde/ami. Donc, le mois de janvier voit une pléthore d’abonnement se signer au centre de conditionnement physique et février voit souvent le dur retour à la réalité que le gym, ce n’est pas pour eux. Alors, acquiesçant avec ces derniers mais tentant tout de même d’encourager les autres à persévérer, je crois qu’il n’y a rien de mieux que quelques séances intenses d’entraînement avec, à la clé, de la bonne musique pour donner du rythme! Voici donc ma deuxième chronique de l’année 2014 pour les martyrs du tapis roulant. – Steph

Leaves’ Eyes
« Symphonies of the Night »
Napalm Records
2013
Il y a deux catégories de mélomanes: ceux qui cherchent continuellement de nouvelles sonorités et ceux qui se réfugient dans le confort de ce qu’ils connaissent bien. Si vous appartenez à la deuxième catégorie et que vous êtes moindrement familiers avec la musique du groupe germano-norvégien Leaves’ Eyes, Symphonies of the Night est pour vous!
Dès l’écoute du premier titre, Hell to the Heavens, nous savons que nous aurons droit à du Leaves’ Eyes pur jus, c’est-à-dire un métal symphonique teinté d’une belle touche folklorique où se mélangent la voix cristalline de Liv Kristine et sa contrepartie agressive masculine, son mari Alex Krull. Le groupe ne s’aventure donc pas hors de ses terres habituelles, nous offrant des chansons dont la trame littéraire mélange légendes et personnages historiques. À travers les onze chansons qui composent l’album (treize sur la version de luxe), l’auditeur apprendra à connaître la princesse wisigothe Galswynthe, Ophélie du Hamlet de Shakespeare, Sainte-Cécile-de-Rome, Éléonore de Provence et la célèbre pucelle d’Orléans, Jeanne d’Arc.
Musicalement, tout est bien maîtrisé car Leaves’ Eyes se contente de répéter efficacement une recette testée maintes fois. Métal symphonique oblige, les claviers dominent l’ensemble, au détriment d’une guitare qui se fait un peu trop timide et d’une section rythmique un peu étouffée par la production. Les arrangements orchestraux sont bien soignés et se marient à merveille aux vocaux omniprésents tout au long de l’album: en effet, les passages instrumentaux se font rares, permettant au couple leader de démontrer tout son savoir-faire, particulièrement Liv Kristine dont la voix gagne en amplitude d’un album à l’autre.
Parmi les titres qui se démarquent, notons Hymn to the Lone Sands, une pièce bien amenée par une belle introduction acoustique, qui fait ensuite place à un rythme effréné et aux plus belles envolées musicales de l’album; Angel and the Ghost, une mélancolique chanson mid-tempo qui offre un bel échange entre les vocalistes; et Maid of Lorraine, qui intègre avec habileté tous les éléments du groupe: folk, voix rageuse et orchestration somptueuse. Mise à part la monotone Saint Cecilia, les moments faibles se font rares et chaque chanson revêt un bel intérêt, gardant l’auditeur dans le coup de A à Z.
J’évoquais ci-haut que la version de luxe de l’album incluait deux pièces additionnelles: il s’agit d’une dispensable reprise de One Caress de Depeche Mode et d’un duo de Liv Kristine avec sa sœur, Carmen Elise Espenaes (la chanteuse de Midnattsol), la plutôt molle Eileen’s Ardency. Bref, contentez-vous de la version régulière de l’album.
Au final, même si l’auditeur aura l’impression de se retrouver devant un plat réchauffé, il faut admettre que Leaves’ Eyes a atteint un niveau de constance qui lui permettra de fidéliser davantage sa large base de fans. C’est pourquoi on peut facilement passer par-dessus cette impression de déjà-vu pour apprécier pleinement cet album qui offre une très belle unité de ton et qui confirme qu’à défaut de ratisser large, Leaves’ Eyes réussit à donner de plus en plus de profondeur à sa musique avec cet album qui, en bout de ligne, s’avère une belle réussite malgré les réserves émises plus tôt. Notez que le groupe sera de passage à Montréal le 18 février aux Foufounes Électriques en compagnie de Moonspell et du groupe de Alex Krull, Atrocity.
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Elferya
« The Straight and Narrow »
Auto-production
2012
Si le premier album de ce groupe suisse était arrivé sur les tablettes un mois tard (il est paru le 1er décembre 2012), il se serait mérité une place sur ma prestigieuse liste d’albums des Fêtes 2013. Question de rétablir les choses, je choisis donc de vous présenter cet album aujourd’hui.
Dans ce genre très fréquenté qu’est le métal symphonique, il est très difficile de sortir du lot, mais force est d’admettre que ces musiciens, originaires de Lausanne, ont réussi à faire leur marque dès ce premier essai. La plus belle qualité de The Straight and Narrow se retrouve au niveau de l’équilibre que le groupe a réussi à donner à sa sonorité: l’amateur de guitare sera tout aussi satisfait que le fan de claviers et la section rythmique, bien pesante, n’est pas laissée en plan. L’utilisation ici et là du violon vient agréablement augmenter le tout, particulièrement sur Mystic Land, une instrumentale enjouée à saveur celtique.
Elferya se montre aussi très habile à donner à ses chansons une ambiance de rêve qui vient compléter à merveille les paroles, qui évoquent un univers fantastique et féérique (dans ce rayon, l’introduction de Butterfly est une réussite totale). Les chansons sont donc souvent introduites par des claviers délicats qui nous font entrer dans l’histoire, avant que les autres musiciens viennent s’en donner à cœur joie. Il serait aussi difficile de passer à côté de la performance vocale de Claire-Lyse von Dach; ayant étudié le chant classique, elle démontre une belle maîtrise de sa haute et puissante voix. Fait non négligeable, la dame possède une voix bien particulière qui nous empêche de la comparer à une quelconque autre reine du métal symphonique.
Comme presque tous les jeunes groupes évoluant dans ce genre musical, on peut déceler ici et là des influences de Nightwish; on pourrait parfois se douter que c’est le Tuomas Holopainen de l’époque Oceanborn qui se tient derrière les claviers, particulièrement sur les titres The Silence of the Night (l’intro est frappante), Luna et Master of Death. Toutefois, le jupon dépasse si peu qu’on ne peut pas classer Elferya dans le rang des clones des célèbres finlandais.
Il est très facile de classer The Straight and Narrow au rang des belles réussites, les musiciens ayant réussi à faire preuve d’une belle maturité musicale dès leur premier essai. Il est d’ailleurs très surprenant qu’aucune maison de disques n’ait encore mis la patte sur ce groupe que l’on devra garder à l’œil…
Stéphan Lévesque
by Stéphan Levesque | Jan 11, 2014 | Critiques, Critiques d'Albums, Les "Elles" du Métal
Vous avez peut-être eu la chance de découvrir Stéphan au cours des derniers mois alors qu’il nous a offert quelques petits textes qui nous ont fait découvrir ce qui le fait tripper dans le metal: les groupes qui utilisent de douces voix féminines lyriques. Le voici maintenant avec sa chronique bimensuelle régulière dont j’ai le plaisir de vous présenter ici la 1ère offrande. – Lex

Après avoir offert aux lecteurs de Ondes Chocs quelques collaborations, dont un récit de mon passage au Metal Female Voices Fest XI en Belgique l’automne dernier, l’idée de vous parler de ma passion sur une base plus régulière a fait surface. Voici donc « Les elles du metal« . « Elles » parce que les albums que je vous présenterai mettront toujours en vedette une voix féminine; « elles » aussi parce que, nous, fans de metal, irons bien sûr tous en enfer. Publiée sur une base bimensuelle, j’espère que cette nouvelle chronique vous permettra de faire d’intéressantes découvertes. Bonne lecture et, surtout, bonne écoute!
La période des Fêtes étant passée, c’est le temps de digérer toutes ces victuailles ingurgitées en trop. Pour ce faire, rien de mieux que quelques séances intenses d’entraînement avec, à la clé, de la bonne musique pour donner du rythme! Voici donc ma première chronique de l’année 2014, qui inaugurera le format que je veux désormais donner à ma collaboration chez Ondes Chocs: tout d’abord je vous présenterai une nouveauté ou une parution relativement récente, avant de fouiller ensuite dans mon coffre aux trésors pour vous suggérer un album un peu moins nouveau (2012 ou plus âgé) qui vaut la peine d’être (re)découvert. – Steph

Sorronia
« Words of Silence »
Bakerteam Records
2013
Dans la vie, à la quantité de musique que l’on écoute, il est parfaitement normal de tomber sur un album qui nous plaît moins; Words of Silence, premier essai du jeune groupe hongrois Sorronia, se classe dans cette catégorie. Première déception dès l’entrée du CD dans le lecteur : la durée totale n’est que de 32 minutes. Payer le prix régulier pour ce qui est un EP déguisé s’apparente à de la fausse représentation. Par contre, je me disais que si les 32 minutes étaient mémorables, ce serait une consolation. Malheureusement ce n’est pas le cas.
La première pièce, la courte instrumentale Intro, est fort prometteuse. C’est avec un mur de claviers symphoniques que l’on entre dans l’album et ceci annonce les couleurs de la musique de Sorronia qui est dominée par ces claviers despotiques qui enterrent les autres composantes sur toute la (courte) durée de l’album. La sonorité de ces derniers est agréable, ce qui constitue le principal point fort de Words of Silence. En fait, la guitare réussit à ne sortir du lot que lorsqu’un solo est prévu, sinon elle se retrouve totalement enterrée, ce qui est décevant car le guitariste Laszlo Szabo s’en tire très bien sur son instrument.
Pour ce qui est du reste, ces 32 minutes s’avèrent plutôt décevantes. La deuxième chanson, Fallen Angel, est fort bien construite mais la production qui étouffe tous les instruments sous les claviers, ainsi que l’insupportable narration dévaluent considérablement ce qui aurait pu être une pièce franchement solide. Le reste de l’album est à l’image de cet extrait: Sorronia nous souffle le chaud et le froid en gratifiant ses chansons de bons moments malheureusement masqués par un parti-pris de la production et certaines mélodies linéaires. Ces mélodies n’accrochent pas l’oreille, la guitare – à l’exception des solos plutôt intéressants – et la section rythmique sont virtuellement absentes et le chant de Anna Kiraly, pas forcément mauvais, manque d’aplomb et de force et ne suffit pas à servir d’arbre pouvant cacher la forêt.
Words of Silence n’est pas, au final, un ratage majeur, mais il ne passera pas non plus à l’histoire. Bref, il manque cet ingrédient, ce petit quelque chose parfois indéfinissable qui nous rendrait ce premier tour de piste beaucoup plus agréable. Ce ne serait donc pas erroné de dire que Sorronia s’est précipité trop vite au studio pour enregistrer un album qu’il aurait pu améliorer grandement s’il avait pris le temps de peaufiner son art.

Victorians
« Revival »
auto-production
2012
Il est toujours surprenant de constater que certains groupes, malgré un talent remarquable, se retrouve obligé de publier sa musique de manière indépendante car aucune maison de disques n’a cru bon de lui faire signer un contrat. Ceci n’a pas empêché le groupe polonais Victorians de frapper un grand coup avec son premier album, Revival, publié en 2012.
Voici un album taillé sur mesure pour les mélomanes qui aiment la musique grandiose et théâtrale. Le premier élément qui aide Victorians à se démarquer est la voix de la chanteuse Eydis, qui possède non seulement beaucoup de puissante, mais aussi un timbre bien particulier plus grave que la moyenne des chanteuses oeuvrant dans le même créneau musical. Elle utilise cette voix à bon escient, explorant la large palette de ses capacités en se montrant apte à s’élever dans les hautes notes lorsque nécessaire tout en étant capable d’offrir un chant rock avec efficacité. Il n’y a nul doute qu’une voix comme celle-ci ajoute une grande chaleur à la musique.
Parlons-en de la musique, justement. Comme tous les groupes de metal symphonique, ce sont les claviers qui occupent la place principale. Ceux-ci, reproduisant souvent des sons de cordes, sont bien choisis et arrangés avec soin. Malgré cette grande présence des claviers, les autres instrumentistes ne sont pas relégués au rôle de figurants, grâce à la production claire qui donne à chaque instrument la juste place qui lui revient. La section rythmique, solide, formée de V. à la basse et de Mr. Nice (!) à la batterie s’illustre particulièrement sur la pesante Who Never Loved et sur la très enjouée Servants of Beauty. Quant à lui, le guitariste Utis soutient bien le jeu grâce à des riffs efficaces et il a la chance de démontrer son habileté à la six cordes lors de quelques solos bien exécutés, même si Victorians ne mise pas sur l’aspect performance pour se démarquer. C’est davantage la belle unité affichée par les instrumentistes que leur habileté individuelle qui apporte à la musique toute sa puissance.
Si j’avais une réserve mineure à émettre au sujet de Revival, c’est l’absence d’un ou deux titres instrumentaux qui viendraient varier un peu le cours des festivités. En effet, les 11 chansons sont construites relativement de la même manière et sont d’une durée sensiblement identique, ce qui a pour conséquence que la musique cesse de nous surprendre en milieu de parcours malgré sa grande qualité. Cette objection peut être toutefois rapidement balayée sous le tapis car, fait rare pour un groupe à son premier album, aucun morceau ne s’avère faible. Pourtant, le groupe démontre sur Siren et sur Juliet’s Tale qu’il peut ajouter ici et là un élément de surprise en ajoutant un court passage instrumental se détachant de la mélodie ou bien une narration colorée. Souhaitons que Victorians se montre un petit plus aventureux sur ses essais futurs car le talent de ses musiciens, sa riche palette sonore et la voix unique de sa chanteuse l’autorisent à se permettre toutes les audaces. Les éléments sont là, prêts à être maximisés.
Ce n’est donc pas exagéré de prétendre que Revival s’avère une réussite quasi-totale, l’inspiration étant constante de A à Z. Ces Polonais au look hors de l’ordinaire ont entamé l’écriture de nouveau matériel qui pourrait, selon mes informations, donner naissance à deux nouveaux albums qui seraient publiés à la fin de cette année et au début de 2015. Voici une bonne nouvelle car il n’y a nul doute que la musique colorée du groupe se prête très bien à l’exercice de l’album concept qui, conformément au souhait que j’ai exprimé au paragraphe précédent, résulte souvent en une musique plus aventureuse.
Stéphan
by Stéphan Levesque | Déc 16, 2013 | Articles Divers/Primeurs/Annonces

La première véritable bordée de neige est maintenant chose du passé. Ceci nous certifie deux choses : les espadrilles ont dû être remisées au profit des bottes et la fête de Noël approche. J’en vois déjà parmi vous qui sont un peu découragés car Noël n’est pas qu’une fête où l’on mange de la dinde et où on en profite pour boire une petite bière de trop sans se sentir coupable. Non. Noël, pour beaucoup de gens, c’est la grande aventure des achats de cadeaux. Afin de vous aider à vous en sortir, voici une liste de dix albums parus en 2013 que vous devriez placer sous le sapin pour le fan de métal dans votre famille. Si vous m’avez lu auparavant sur ce site, vous ne serez pas sans savoir que toute cette belle musique est accompagnée de voix féminines…
MÄRCHENBILDER, The Flickering Truth
À tout seigneur, tout honneur, je suis fier de vous recommander un produit québécois en début de liste. Märchenbilder (qui signifie « images de contes de fées ») est un groupe montréalais et tire son nom d’un opus du compositeur Robert Schumann. Dans cet esprit, il est donc assez logique que le résultat final soit très inspiré par la musique classique. The Flickering Truth est un album très riche au niveau musical, intégrant à merveille les instruments classiques à la panoplie d’instruments habituels utilisés dans le rock. Ainsi, violon et alto côtoient guitares et claviers pour nous amener dans de territoires rarement explorés en musique métal. La chanteuse Julie Bélanger Roy, dotée d’une puissante voix d’opéra, ajoute beaucoup de couleurs à la richesse musicale de l’ensemble en utilisant cette voix de manière variée tout au long de l’album. Le tout est un peu difficile d’approche en raison de sa grande complexité, mais lorsque l’on réussit à s’imprégner de la musique de Märchenbilder, il est impossible de ne pas être séduit.
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AMBERIAN DAWN, Re-Evolution
Petite parenthèse dans la carrière du groupe finlandais, Re-Evolution est en fait une compilation de onze chansons tirées de leurs quatre premiers albums. Pourquoi acheter une compilation, alors? Parce qu’Amberian Dawn profite de ce contexte pour nous présenter sa nouvelle chanteuse, Capri, engagée pour remplacer la démissionnaire Heidi Parviainen. Le compositeur/claviériste Tuomas Seppälä a du même coup saisi la balle au bond pour réarranger certaines parties musicales. Le résultat est convaincant : les pièces d’Amberian Dawn paraissent plus denses musicalement et la voix de Capri se glisse parfaitement bien sur la grande majorité des titres. Bien sûr, cette transition ne s’est pas faite sans créer un débat de style Nightwish, c’est-à-dire que les fans en ont profité pour comparer la valeur d’une chanteuse rock (Capri) avec celle d’une chanteuse d’opéra (Parviainen). Verdict : les deux chanteuses sont différentes, mais excellentes. Re-Evolution est une belle occasion pour redécouvrir ce groupe sous-estimé. Un nouvel album de matériel original, Magic Forest, est prévu pour 2014.
ARVEN, Black is the Colour
Habituellement les groupes de métal à voix féminine ne comptent qu’une femme dans leurs rangs : la chanteuse. Chez Arven c’est le contraire, le groupe ne comprend qu’un seul homme dans sa formation : le batteur! L’effet est très particulier de voir une bande de filles faire du métal. En bon mélomane, on se doit toutefois d’éviter de tomber dans le piège de considérer ce groupe seulement pour des raisons de curiosité car les dames ont beaucoup de talent (j’en profite quand même pour avouer craquer pour la rouquine chanteuse Carina Hanselmann). Deuxième album de la formation allemande, Black is the Colour est encore une fois teinté d’une légère ambiance celtique que l’on retrouvait aussi sur leur première parution, Music of Light (2011). Toutefois cet aspect y est moins présent, ce qui rend la musique d’Arven moins originale même si elle demeure très avenante et entraînante. Voici donc un album qui, sans tout casser sur son passage, se révèle extrêmement agréable à l’oreille et marque une évolution certaine au plan de l’écriture, les compositions se faisant plus soignées et plus complexes.
DELAIN, Interlude
Le titre de ce quatrième album de Delain est très bien choisi. En effet, Interlude marque une transition pour le groupe néerlandais qui a profité d’un changement de maison de disques pour faire paraître ce recueil formé de nouvelles compositions (entre autres l’excellente Collars and Suits), de reprises, d’une pièce réenregistrée (une version ballade de We Are the Others) et de chansons en spectacle. La clé de cette parution est le deuxième disque, qui est en fait un DVD qui nous offre des vidéoclips, des images derrière la scène du groupe en tournée et, item le plus intéressant, cinq pièces filmées au Metal Female Voices Fest X en Belgique en 2012. Interlude n’est donc pas l’album idéal pour découvrir Delain, il est plutôt fait pour les fans (dont je suis) qui veulent mesurer l’évolution d’un groupe qui ne devait être au départ qu’un projet de studio et qui maintenant s’impose parmi les meilleurs de son genre.
EDENBRIDGE, The Bonding
Mine de rien, The Bonding est déjà le huitième album studio des Autrichiens. Voici un groupe qui n’a jamais progressé avec empressement mais qui s’est toujours concentré à donner plus de profondeur à son propos musical, bien marqué par les envolées lyriques et progressives de la guitare de Lanvall et bien identifiable par la voix paisible de Sabine Edelsbacher. The Bonding ne marque donc pas une révolution dans le petit monde d’Edenbridge, la seule variable étant que le groupe utilise de nouveau un orchestre symphonique, ce qu’il avait fait avec réussite sur le superbe MyEarthDream, paru en 2008. Edenbridge est possiblement le plus doux des groupes métal, offrant une musique chaleureuse sans une seule once d’agressivité qui plaira aussi aux fans de rock progressif (la pièce-titre, une perle de 15 minutes, est plus « prog » que métal). Rien de révolutionnaire, mais un album qui sait se faire aimer.
MAGION, A Different Shade of Darkness
Le deuxième album de ces Néerlandais est un des souvenirs qui a traversé l’Atlantique avec moi. Celui-ci a été lancé tout de suite après la performance inspirée que le groupe a offert au Metal Female Voices Fest. Comme je l’avais constaté en direct, les nouvelles compositions marquent une belle évolution par rapport à l’agréable Close to Eternity, publié en 2010. Les dix chansons, bien développées, laissent une belle place à des passages instrumentaux qui démontrent l’excellent niveau des musiciens. Ce sont les claviers qui se taillent la part du lion, donnant une sonorité très symphonique à l’ensemble, la guitare s’affirmant surtout sur les susnommées séquences instrumentales. Derrière le micro, la chanteuse Myrthe van Beest, avec sa voix rappelant un peu Liv Kristine de Leaves’ Eyes, est impeccable et complète parfaitement bien le travail de ses collègues. L’amélioration la plus notoire se situe au niveau de la production : n’étant pas tout à fait au point sur le premier-né du groupe, elle est ici très solide et permet à l’auditeur d’apprécier toutes les forces de cet album qui mérite de nombreuses écoutes.
REVAMP, Wild Card
Groupe formé par la chanteuse Floor Jansen suite à la séparation d’After Forever, ReVamp nous a offert cette année son deuxième album, Wild Card. Misant sur une formule similaire à celle d’After Forever, ReVamp présente des séquences hautement mélodiques, mais mise surtout sur les séquences plus rudes, permettant à Floor Jansen d’explorer davantage le côté agressif de sa voix. Étant capable de chanter de l’opéra de manière impressionnante comme vous pourrez le constater en cliquant ce lien, elle démontre sur Wild Card qu’elle peut chanter avec rage, voire même avec hargne, en chantant elle-même des parties de grunt; je me suis vraiment laissé prendre en croyant que c’était un homme qui poussait ces notes! Dans le rayon du grunt, on peut aussi entendre les invités Mark Jansen d’Epica (aucun lien de parenté avec Floor) et Devin Townsend. Musicalement le tempo est rapide, les musiciens ne chômant pas sur leurs instruments. Avec toute cette intensité, autant vocale que musicale, on s’en sort avec une écoute lourde et essoufflante, mais très satisfaisante.
SERENITY, War of Ages
Depuis sa parution en mars, je crie sur tous les toits que War of Ages est l’album de l’année. Laissez-moi profiter des dernières semaines de 2013 pour le faire de nouveau. Sur la forme, ce quatrième album des Autrichiens n’est pas bien différent de leur précédent, Death & Legacy. Au niveau du propos, nous avons donc de nouveau droit à une leçon d’histoire, les paroles tournants autour de différents personnages ou événements historiques. La musique du groupe est toujours hautement symphonique et entraînante, la guitare et les claviers prenant tour à tour la vedette, le tout bien complété par une section rythmique lourde et efficace. La nouveauté que nous offre Serenity, c’est l’ajout d’une chanteuse à son arsenal. Venant surtout supporter le travail de son acolyte masculin Georg Neuhauser, la Française Clémentine Delauney ajoute toutefois une belle richesse à l’ensemble (difficile d’imaginer Royal Pain, The Matricide ou Wings of Madness sans elle), sa voix étant perceptible tout au long de ce parcours sans faute. Du grand art.
TOTHEM, Beyond the Sea
Depuis la nuit des temps, je fais l’apologie de la barre de droite sur YouTube. Cette dernière m’a permis de faire de très agréables découvertes, y compris celle de ce groupe italien. Existant depuis 2003, Tothem avait deux mini-albums sous la cravate (Tothem en 2003 et Osaka Bed & Breakfast en 2010) avant d’enfin publier son premier album complet cette année. Beyond the Sea nous présente un groupe bien en contrôle, la cohésion entre les instrumentistes étant impeccable. Misant sur le format court, les pièces sont bien musclées, soutenues et transportées par des riffs de guitare efficaces. La musique, fort intéressante, est toutefois élevée vers le haut par la très jolie voix de Roslen Bondi. Cette dernière, ayant un registre très étendu, sait utiliser ses capacités de façon appropriée, chantant tantôt de façon puissante, tantôt avec plus de retenue afin d’amener une belle variété dans nos oreilles. Bref, elle ne tombe pas dans le piège de vouloir toujours pousser la plus haute note, fâcheuse habitude qui peut rebuter certains mélomanes qui tentent de s’initier au métal à voix féminines.
TARJA, Colours in the Dark
Preuve que le temps passe vite, Tarja Turunen n’est plus la chanteuse de Nightwish depuis huit ans déjà! Colours in the Dark est le troisième album solo de la Finlandaise, et sans aucun doute son plus réussi. Tout en continuant à mélanger les genres, Tarja semble avoir mieux cerné son créneau, la force de ce nouvel opus étant surtout sa plus grande homogénéité. On a donc affaire à un rock mélodique où se côtoient à merveille des compositions plus musclées et d’autres plus atmosphériques. Le tout, bien produit, coule de source et permet surtout de mettre en vedette la voix typique et reconnaissable de la dame qui est entourée d’une solide équipe de musiciens. Si, sur Colours in the Dark, on ne retrouve pas la grandiloquence de la musique de son ancien groupe, on peut quand même cerner des passages hauts en couleurs, particulièrement sur la magnifique Deliverance, de loin la plus symphonique des pièces de sa deuxième carrière. On sent donc une belle progression sur chaque album, ce qui nous donne déjà hâte de savoir comment sonnera l’étape suivante.
Au moment d’écrire ces lignes, je suis en train de jeter l’oreille sur Symphonies of the Night, le nouvel album de Leaves’ Eyes, et le nouveau Blu Ray de Nightwish est sur le point d’aboutir dans ma boîte aux lettres. Nul doute que j’aurai la chance au cours de la prochaine année de vous entretenir de ces parutions car certaines personnes chez Ondes Chocs semblent vouloir me voir contribuer de nouveau ici (merci pour votre confiance, les amis!). Ma modeste contribution pour tenter de vous inciter à consommer pour faire rouler l’économie étant faite, il ne me reste plus qu’à vous souhaiter un joyeux temps des Fêtes. Amusez-vous bien et surtout montez le son car c’est Noël et vos voisins ne pourront pas vous blâmer pour la musique forte!
Stephan