Trois-Rivières Metalfest 2015

PREMIER SOIR

Vendredi le 25 mars 2015 s’amorçait la 14e édition du Trois-Rivières Metalfest. Plusieurs adeptes des sous-genres les plus agressifs de la musique metal se sont réunis durant ces deux journées consécutives de fébriles réjouissances pour venir encourager les différents groupes qui étaient à l’affiche durant cette décapante fin de semaine. Le premier soir, l’organisation du Metalfest nous laissait entre les mains d’Outlying, Obliterate, Killitorous, Soothsayer, Augury, Cryptopsy, Terrorizer et God Dethroned.

C’est donc avec une impétuosité sans pareil que j’échappais au froid mordant de Rimouski, vendredi, tôt en matinée, pour me rendre à ma toute première édition du Trois-Rivières Metalfest. Après un cumulatif d’un peu plus de quatre heures de route, j’ai été particulièrement bien reçue par l’équipe du fest à mon arrivée sur place, tout juste avant la montée sur scène du premier groupe de la soirée. Durant ce temps, j’ai eu l’occasion de faire un bref tour d’horizon de la salle et j’ai été fascinée par les nombreux kiosques de merch sur place; non seulement il était possible d’observer les tables déjà montées présentant la merch des groupes présents ce soir-là, mais parmi eux se trouvaient divers autres commerçants de fournitures metal diverses (CDs, DVDs, vinyles, patches, etc.) vendues à de modiques sommes. La Heineken fraîche m’a été servie avec une incroyable politesse et un sourire à couper le souffle; la scène était haute et vaste, les murs de la bâtisse semblaient suffisamment solides pour accueillir la horde de poils qui commençaient à débarquer… We were all in for a special treat!

Outlying se sont présentés sur scène à 6 heures tapant et ont attaqué leur set qui totalisait une vingtaine de minutes; bon nombre de ceux qui étaient déjà présents scandaient les paroles des différentes pièces, chose que j’ai trouvée particulièrement touchante; le groupe trifluvien a été acclamé et on sentait une certaine complicité entre la foule et les musiciens, ce qui m’a rappelé les spectacles que nous avons l’occasion de voir dans nos petites régions du Bas du Fleuve.

Obliterate, un groupe de deathcore de Québec, ont ensuite pris place sur scène avec leur énergie plutôt singulière! J’ai découvert ce groupe d’un bout à l’autre et je dois leur donner ce point: ils ont certainement été le groupe le plus original du Metalfest! Ils ont su amener la foule à se déchainer directement en début de soirée et ont donné le pas pour le groupe suivant.

Je crois que nous devrions témoigner de l’estime deux fois plutôt qu’une à Killitorous de nous avoir livré une telle performance en dépit de l’événement qui s’est produit lors de leur dernier passage à Montréal. Pour ceux qui n’ont pas eu vent de cette histoire, le van du groupe a été vandalisé le 24 janvier dernier lors du Kings of Chaos Tour et les gars ont malheureusement perdu beaucoup. Les membres du groupe essaient de s’en remettre tant bien que mal et ils ont tout mon respect d’être venus nous brasser la cage comme ça à peine deux mois seulement après ce cauchemar. Bref, j’imagine que c’est ce que l’on appelle être capable de «se r’virer sur un dix cent»! Quand Killitorous ont joué leurs premières notes, j’ai eu l’impression qu’on venait de mettre du bois dans la fournaise: la foule s’est finalement approchée tandis que ceux à l’écart, malgré leur réticence, commençaient déjà à se faire brasser la carcasse par ceux qui tentaient de déclencher un pit. J’avais souvent entendu parler de ce groupe avec Youri au micro, mais c’était ma première expérience. Je n’ai aucune étiquette négative à accoler à leur performance et nous avons même eu droit à un Youri en «tenue légère» qui disait un peu plus tard déjà sur internet: «clothes are overrated!».

OK. Les choses étaient déjà particulièrement sérieuses mais là, on tombait pas mal dans mes cordes: j’aime les vieux, j’aime le poil, j’ai été gâtée. Soothsayer de Québec se sont pointés et j’ai dû accepter le fait que ma bière, encore pleine à ras-bord, en souffrirait. Unique groupe thrash à la sauce old school de la soirée, on avait ici un apéritif de choix en vue du passage de groupes tels que Genetic Error et Razor attendus pour le lendemain soir. Armés de leurs ceintures de balles portées à la Sarcófago (thrash du Brésil) et de leurs jambières «paddées» de clous rouillés, ils nous ont balancé leur set avec une ardeur effarante! Le dernier spectacle du groupe avait été dispensé en novembre dernier aux Katacombes de Montréal avec le groupe DBC.

Augury savent faire planer une ambiance complètement unique avec leur death metal progressif montréalais. Je pouvais voir Dominic Forest Lapointe à l’œuvre pour la énième fois ce soir-là et mon constat fut le même qu’à l’habitude: quelle adresse! Tout au long du spectacle, je me suis un peu sentie comme «un cordonnier mal chaussé» en ce sens où j’ai vu bien des spectacles jusqu’à ce jour, mais je n’avais encore jamais pu apprécier cet excellent groupe québécois aux musiciens dotés d’une exorbitante virtuosité performer sur scène. J’ai néanmoins remédié à cette situation grâce au Trois-Rivières Metalfest et je conseille vivement à tous de ne pas attendre aussi longtemps que moi avant de passer aux choses sérieuses!

On ne pourra pas dire que, côté death metal technique, le Québec n’aura pas fait sa part. Cryptopsy prend possession de la scène et je crois avoir cessé d’exister un court moment. Mon enveloppe corporelle est devenue une sorte de masse de chair quelconque à se faire «barouetter» dans tous les sens dans un pit de force G. Qui n’a pas déjà vu Cryptopsy live? Je ne crois pas qu’ils aient besoin d’une présentation et d’une description bien étendue de leur performance… On plaçait décidément la barre bien haute tout juste avant Terrorizer

Je ne sais pas si j’étais l’unique metalhead Québécoise à m’être résignée par le passé à ne jamais voir Terrorizer live, mais après avoir rencontré le Commando en chair et en os un peu plus tôt en début de soirée, ma hâte de les voir sur scène n’avait d’égal que la lourdeur de leur musique une fois sur scène. Leur deathgrind franc et bestial a tout ravagé et m’a donné l’impression d’être écrasée sous une masse de briques. Ça aura sincèrement valu l’attente d’une éternité et je ne crois pas être la seule à espérer qu’ils reviennent nous visiter sans tarder!

God Dethroned, formation death metal des Pays-Bas, étaient de passage pour le Trois-Rivières Metalfest et on doit dire que leur détour n’aura pas été inutile. Alors qu’on nous annonçait durant la soirée que la formation italienne Fleshgod Apocalypse ne pourrait être des nôtres le lendemain pour des raisons complètement hors de contrôle autant pour eux que pour les organisateurs du fest, on apprenait que les Néerlandais, qui prévoyaient déjà rester pour se délecter des shows du samedi soir, avaient offert aux organisateurs de nous donner un 30 minutes de set gratuit pour compenser le manque que créerait l’absence de la tête d’affiche tant attendue du samedi soir. Sincèrement, si ça ce n’est pas avoir cerné l’essence même de l’esprit metal! Ils ont tout ravagé le premier soir et je crois que la foule ne comptait que très peu de mécontents quant au fait de les voir performer à nouveau le samedi.

Mon moment fort du premier soir du festival? Sans aucun doute ma rencontre, aussi brève fut elle, avec mister Pete Sandoval!

Il était maintenant temps d’aller se refaire des forces avec une bonne poutine au Stratos avant d’aller dormir en attendant impatiemment la seconde partie du Metalfest…
DEUXIÈME SOIR

Malgré le froid mordant et en dépit du fait que Fleshgod Apocalypse, la tête d’affiche de la seconde partie du Trois-Rivières Metalfest, ait dû canceller leur performance par rapport à la grève des contrôleurs aériens qui se déroule présentement en Italie, nombreux sont les vrais mordus de métal à s’être déplacé pour venir encourager les organisateurs et pour venir se délecter des diverses prestations d’une foule d’autres groupes tous meilleurs les uns que les autres.

Bookakee ont entamé la soirée tout en couleurs (et je crois que c’est plutôt le cas de le dire) devant une foule déjà réunie à l’avant de la scène malgré l’heure prématurée de leur set. Je n’avais jamais encore eu l’occasion de les voir attaquer leurs pièces, mais je crois que l’on peut dire que Phil (vocals) feint très bien d’être aliéné; de la découpe faciale à l’avortement pour le moins particulier, nous avons eu droit à bien des surprises de sa part, surtout visuellement parlant. Une créature qui a du coffre, c’est bien le cas de le dire! Malgré le sentiment d’avoir croulé sous la masse d’événements se produisant sur scène (j’ai eu l’impression qu’ils voulaient tout passer durant le court laps de temps qui leur était alloué), ce fut une prestation distrayante qui donnait bien le pas pour le bal!

Unique groupe de la fin de semaine à nous proposer une musique aux racines davantage forgées dans le black metal, Ordoxe nous ont livré une performance particulièrement riche! Le morceau interprété avec Marie-Claude Gosselin de My Fatality (Sherbrooke) n’a fait que rendre le set encore plus intéressant! Leur présence sur scène et la complicité qui unissait les deux chanteurs à ce moment-là étaient à couper le souffle! Sincèrement, l’enthousiasme contagieux des membres du groupe est à souligner et c’était un plaisir pour les yeux (et pour les oreilles, bien évidemment) de les voir tout donner pour leur public.

Je dois l’admettre, je n’ai jamais été une grande admiratrice des groupes dans lesquels on peut retrouver une femme, peu importe l’instrument ou la position qu’elle occupe dans ledit groupe (mis à part Jo Bench, ouais… Merde que j’adore Jo Bench!)… Mais il faut avouer que mademoiselle Boyer de Karkaos a de l’énergie à revendre sur scène! Il fallait bien en laisser un peu pour la gent masculine puisque nous, les filles, avons été particulièrement gâtées tout au long du weekend! Viky et ses musiciens ont donné une remarquable prestation et je crois que nous pouvons nous vanter, comme Québécois, de posséder un lot de belles femmes au vocal éraillé!

Genetic Error, qui donnaient leur premier spectacle après 20 ans d’absence sur les planches, ont su agiter la foule, des plus vieux (et fins connaisseurs de la formation), aux plus jeunes (qui accompagnaient parfois leurs vieux pères qui se disaient «ne plus être jeunes jeunes» à la vue du groupe sur scène), en passant par les simples adeptes du sous-genre metal qui découvraient tout simplement le groupe. Thrash/crossover trifluvien, ce fut pour moi une découverte particulièrement plaisante!

Pour plusieurs, Benighted a été le moment fort de la fin de semaine. Pour tous ceux qui étaient dans le pit, c’était forcément vrai! La formation française de brutal death/grind complétait sa tournée canadienne de 23 dates avec Bookakee lors de la seconde soirée du Trois-Rivières Metalfest. Je n’avais pas eu l’occasion d’assister à leur show le 27 février dernier au Cactus de Rimouski et je suis enchantée d’avoir pu les voir lors du fest. Officiellement, le plus gros pit de la fin de semaine s’est produit lors de leur set et mes vertèbres endolories les en remercient!

Au grand plaisir de certains spectateurs absents la veille, God Dethroned ont joué un second set pour un deuxième soir consécutif. Décidément, leur bonté n’a d’égal que leur talent! Les membres du groupe, qui projetaient déjà de rester à Trois-Rivières pour assister aux prestations du samedi soir, se sont proposés pour offrir GRATUITEMENT cette seconde performance d’une demi heure avec un set complètement différent de celui de la veille (je me répète, mais misère!!!). Nul besoin de vous décrire le type d’accueil qu’ils ont reçu des fans qui semblaient tous avoir été terriblement touchés par ce geste. Nous disons souvent que le metal est une grande famille, mais pour la première fois… je le vivais.

Les Ontariens de Razor, plus vieille formation à avoir performé au cours de la fin de semaine, ont fait bien des heureux en se pointant sur scène. Il fallait être aux premières loges pour observer les sourires qu’arboraient les vieux de la vieille tout au long de leur performance rock/metal thrash. Même si leur présence sur scène était remarquable, j’étais mentalement totalement absente et ne pensais qu’à la venue de Gorguts sur scène qui approchait à grands pas. Le pit toujours aussi explosif et les sourires des vieux thrasheux ne laissent de toute manière aucun doute sur le fait que ce fut une réussite, c’est certain!

Le plat de résistance du Metalfest, en ce qui me concerne, et j’ai nommé… GORGUTS! Je sais que bien des gens étaient déçus du fait que Fleshgod Apocalypse ne pouvaient être présents pour jouer leur rôle de tête d’affiche et pour boucler la boucle du festival, mais Gorguts ont su prendre les rênes avec la vivacité, l’efficacité et la profondeur d’âme nécessaires pour le faire oublier à la majorité d’entre nous (moi la première qui ne pouvais espérer mieux que Gorguts en tête d’affiche, en toute franchise). Je venais les voir performer pour une Xème fois et la seule chose qui m’ait un peu déçue, venant probablement de l’attente et de l’espoir que je nourrissais ardemment depuis l’annonce du festival, est de ne pas avoir eu une setlist composée de pièces qui datent davantage (quelques morceaux de «Considered Dead» peut-être?) Je crois qu’il est compréhensible, étant donné la distance qui sépare les membres du groupe, que ceux-ci ne puissent pas nous livrer des pièces différentes à chaque spectacle (je leur pardonnerais à peu près tout… je sais). C’est donc après une élogieuse présentation du groupe faite par un organisateur que les quatre membres de la formation québécoise se sont présentés sur scène pour nous livrer une performance metal d’une minutie sans faille (flawless, comme on dit en bon «frança»!) et ont quitté celle-ci en laissant les spectateurs complètement en transe. Ayant débuté leur spectacle avec les quatre premiers morceaux de leur dernier opus «Colored Sands» (composé de pièces qui permettent aux musiciens d’enchaîner leurs ballades tibétaines les unes après les autres sans devoir créer un vide entre celles-ci puisque les mélodies se rejoignent, s’entrecroisent et persistent), ils nous ont aussi présenté la pièce titre de «From Wisdom to Hate» (2001) et ont poursuivi leur prestation avec trois morceaux de «Obscura» puis sont revenus, à la demande générale, détruire ce qu’il restait de notre esprit avec «Orphans of Sickness», leur éternel plat de résistance. Chaque fois que Luc Lemay quitte la scène, je repars chez moi toujours un peu plus fière d’être une metalhead du Québec! Son talent, sa dévotion et sa modestie en font non seulement un excellent lead, mais aussi un humain qu’il fait bon d’avoir parmi nos rangs, ici, au Québec! Bref… A mindblowing performance, vous l’aurez deviné!

J’ai beau chercher des puces au festival et à son organisation, je n’y arrive pas. Outre l’annulation de Fleshgod Apocalypse qui ne fut pas de leur ressort, tout était nickel. Je crois que ça vaut la peine de mentionner le fait qu’ils aient préparé des rencontres gratuites d’une durée d’environ 20 min. avec les têtes d’affiche de manière à ce que les spectateurs puissent les rencontrer et faire signer des affiches du festival mises à la dispositions de tous ou encore leurs effets personnels. Les organisateurs étaient un peu partout et toujours à notre disposition pour répondre à toute interrogation, quelle qu’elle soit. Les gars au vestiaire et leur mémoire méritent aussi une mention spéciale – fuck le p’tit papier que tout le monde perd anyway, ils savaient très bien qui portait quoi apparemment! Je pourrais continuer à énumérer les éléments positifs de mon weekend comme ça bien longtemps… Même à propos des toilettes qui étaient propres et le vendredi, et le samedi!

Je comprends que certaines personnes n’ont pu être présentes pour des raisons forcément valables, mais je tiens à dire, en mon nom et probablement au nom de bien des personnes qui ont un penchant pour la musique extrême, que tous ceux et celles qui n’était pas là lors de ce festival ont manqué tout un événement! C’est infernal le nombre de commentaires que l’on voit passer tous les jours depuis l’annonce des groupes qui joueront au Heavy Montréal et au Amnesia Rockfest, de personnes qui se plaignent que ce n’est pas assez «lourd», pas assez «death» et trop «punk» comme set up… Eh bien avec le Trois-Rivières Metalfest, vous aviez le set up parfait pour venir souffrir dans un pit «pas pour les doux» sur la musique d’excellents groupes d’ici et d’ailleurs et croyez-moi, aucun d’entre eux n’était weak. J’aimerais avoir la possibilité d’enlever le droit de chiâler sur les autres fests à ceux qui n’ont pas été foutus de se déplacer pour venir encourager le festival le plus GRAS et le plus BRUTAL au Québec!

 

Remerciements:

Je tiens à remercier personnellement les organisateurs du Metalfest pour l’accueil des plus favorables qu’ils ont réservé à Ondes Chocs dans le cadre de leur évènement en m’offrant un accès libre à celui-ci. De plus, notre équipe tient à féliciter toute l’organisation qui fut une irréprochable réussite; sincères félicitations à toute l’équipe!

Alison Rioux