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Hagl

« In The Heart »

(2013)

Depuis le début des années 2000, un foisonnement assez impressionnant sévit dans le monde des hybrides entre métal et musique folklorique de diverse catégorie (Viking, celtique, Slave, polka…etc.). De plus, longtemps presque entièrement exclus de l’univers du métal connu en Occident en raison du totalitarisme soviétique, les pays de l’ancien bloc communiste connaissent une vague déferlante d’excellents groupes métalliques depuis le milieu des années 1990. Profitant de ces deux lames de fond, Hagl, un groupe de Pagan Black Metal russe fondé en 1999 sous le nom Darkomen, nous présentait, le 30 avril dernier, son troisième album complet en carrière intitulé In The Heart. La question était maintenant de savoir; si le groupe, qui a évolué au fil de ses sorties du Black Metal pur vers le Pagan, allait parvenir à se démarquer dans un sous-genre maintenant très saturé ou s’il allait se contenter de surfer sur la vague en employant les codes bien établis dudit sous-genre? Manifestement, après de nombreuses écoutes, il s’agit plutôt de la deuxième option.

En effet, ce qui frappe dès l’introduction, qui consiste en un monologue en russe sur un fond sonore de pluie et de claviers atmosphérique, est l’étonnante ressemblance avec la musique de leurs compatriotes d’Arkona. On a donc droit à des motifs de guitare typiquement Black Metal intercalés avec d’autres motifs à saveur païenne, parfois acoustiques, et qui s’approchent parfois bien près d’une tendance Death mélodique ou même Powermetal qui rappelle Ensiferum. L’approche vocale du chanteur-guitariste Swarm est quant à elle beaucoup moins variée, se concentrant uniquement sur des hurlements râpeux caractéristiques du Black Metal, dans sa langue natale, qui sont toutefois très bien exécutés. Le jeu de batterie d’Alarm utilise les blastbeats de façon plutôt modérée en préférant se concentrer sur une approche plus organique qui accentue le côté épique des motifs de guitare. Les claviers d’Arian se font très discrets et subtils et se contentent d’un rôle de soutien atmosphérique et d’introduction. La basse d’Isulv est aussi plutôt enterrée dans le collage sonore et est utilisée presque uniquement pour élargir le son d’ensemble. Du côté de la production, Hagl a opté pour un son moderne, travaillé et propre plutôt que pour un son crasseux, ce qui fait ressortir le caractère mélodique et épique de leur musique.

Tout est donc très bien exécuté, le tout s’écoute très bien et la production convient bien à leur style, mais Hagl ratte complètement la cible au point de vue de l’originalité. En effet, leur musique n’amène strictement rien de nouveau ou d’unique sur la table et elle se contente de reproduire les caractéristiques communes du Pagan Black Metal/ Folk Metal. Les motifs de guitare, les claviers et les passages atmosphériques ont tous un air familier de déjà entendu, qui rappelle les gros noms du genre. Si vous avez déjà écouté du Ensiferum et du Arkona, cet album ne vous impressionnera en rien. On y retrouve exactement la même combinaison de voix Black Metal, de motifs mélodiques et Folk avec des claviers pour le côté épique, les voix chantées en moins. Le tout donne donc une impression de manque d’inspiration et de recherche musicale, malgré le fait que la musique est par ailleurs très bien interprétée et que les compositions fonctionnent très bien. Cela est un manque que je considère toutefois majeur étant donné que le groupe officie dans un sous-genre déjà passablement saturé, où il faut absolument se démarquer d’une façon ou d’une autre pour perdurer. Après plusieurs écoutes, l’album peine donc à se faire mémorable malgré le côté accrocheur de certaines mélodies et donnera plutôt envie à l’auditeur d’aller réécouter les groupes séminaux du genre que de revenir à Hagl.

En somme, avec In The Heart, Hagl nous offre un troisième album aux compositions bien montées, bien exécutées et très bien produites qui peinent cependant à se démarquer de ses pairs et influences par leur manque flagrant d’originalité. Cet album sera donc à ne suggérer qu’aux plus fervents amateurs de Pagan/Folk Black Metal, ceux qui ne peuvent tolérer de ne pas connaître un des milliers de groupes du genre. Pour ceux qui recherchent quelque chose de plus unique ou poussé, cet album vous laissera malheureusement cruellement sur votre faim.

6/10

 

Louis-Olivier « Winterthrone » B. Gélinas