Hate Eternal, Vital Remains, Black Fast, Inanimate Existence et Vitiated à L’Anti Bar & Spectacles, mardi le 17 mai 2016. Une présentation de District 7 Production.
C’était en plein milieu de semaine, un mardi soir que les titans du Death Metal de Hate Eternal et Vital Remains feraient un arrêt dans la vieille capitale pour un concert qui promettait de ne pas être doux. Accompagnés de deux supports de tournée; soit Black Fast et Inanimate Existence, les deux formations légendaires seraient aussi précédées d’un support local (merci à District 7 d’avoir pensé à la scène locale), ce qui plaçait le début du concert à l’heure précoce de 18 h 30. C’est donc après un souper sur le pouce que votre serviteur se présenta pile à l’heure pour voir Vitiated s’exécuter.
Quelle ne fut pas la surprise de votre scribe quand il constata qu’un nombre très raisonnable de spectateurs occupait déjà l’endroit, même s’il était très tôt pour un concert du mardi soir. Passé ce constat, celui-ci se concentra sur la performance du groupe local invité.
Vitiated est un quatuor de Metal extrême de Québec qui a commencé sa jeune existence en 2012. La troupe compte parmi ses rangs: Philippe Drouin (Unbreakable Hatred) à la guitare, JP Beaulieu aux grognements et hurlements, Stéphane Beaulieu à la basse et William Rousseau à la batterie. C’était la toute première fois que je voyais ce groupe en concert et je fus convaincu par une performance relativement solide d’une musique combinant Death Metal extrême, passages progressifs aérés axés sur des «grooves» de basse intéressants et des solos de guitare à couper le souffle. Je trouvai même que les talents exceptionnels de guitariste de Philippe Drouin sont encore plus mis en valeur dans Vitiated que dans Unbreakable Hatred, la musique des premiers étant plus aérée et lui laissant plus d’espace entre les passages déments et chaotiques pour nous époustoufler avec sa virtuosité. Du côté du chant, on eut droit la traditionnelle alternance entre grognements gutturaux et hurlements aigus, les premiers étant très bien exécutés et efficaces alors que les seconds me semblèrent moins francs et un peu surutilisés dans le contexte de leur musique. Enfin, le batteur me sembla parfois avoir un peu de difficulté à maintenir le tempo et la précision des roulements de grosse caisse requis par leurs compositions, cependant cela était peut-être imputable à une question d’équipement. Toutefois, la formation sut maintenir l’intensité de sa prestation à une heure un peu trop précoce et capta facilement l’attention des spectateurs. Ce fut donc une très belle découverte pour moi.
Du nord de la Californie, suivait Inanimate Existence qui pratique un Death Metal progressif et technique où se combinent des influences aussi variées que des séquences de claviers à la Dream Theater et des passages tirant sur le Thrash technique et parfois un soupçon de Black Metal. Le quintette se compose de: Ron Casey (batterie), Cameron Porras (guitare), Joel Guernsey (guitare), Taylor Wientjes (grognements et cris) et Scott Bradley (basse). Sur scène, après une introduction spatiale, le groupe se livra à une présentation techniquement très solide de sa musique complexe et variée, peut-être trop variée. En effet, je qualifierais leur genre de Pseudo Death Metal pour et par des personnes souffrant d’une forme très agressive de TDAH et cela dit en tout respect des personnes atteintes de troubles du déficit de l’attention. En effet, leurs compositions semblent être un ramassis de motifs importés de styles divers de Metal et collés ensemble au mépris de tout souci de musicalité et de logique. Lesdits motifs étant entrecoupés d’abominables «breakdowns» génériques à tendance «core», probablement pour faire à la mode et parce qu’ils ne collent pas ensemble. Le tout fait en sorte que la composante Death Metal est extrêmement diluée dans un salmigondis sonore manquant cruellement d’identité. De plus, le chant composé uniquement de cris et de grognements exécutés avec beaucoup de compétence, mais saupoudrés de façon très éparse et prévisible est sous-utilisé. Cela me fit même me demander pourquoi la troupe a besoin d’un chanteur pour en faire aussi peu. Cela dit, bien que je fus peu convaincu par leurs compositions, je fus impressionné par les prouesses techniques du bassiste et des guitaristes et je trouvai leurs passages plus lents et lourds tout de même intéressants.
C’était maintenant au tour de Black Fast de Saint-Louis, Missouri, de venir exécuter leur Thrash Metal progressif noirci sur scène. Le quatuor composé de: Aaron Akin (guitares, cris), Ross Burnett (batterie), Trevor Johanson (guitare) et Ryan Thompson (basse) nous asséna sans cérémonie son Thrash/Speed Metal complexe, accrocheur et garni d’influences Black Metal, notamment dans le vocal. Avec des motifs de guitare complexes qui se promènent sur l’entièreté du manche, une rapidité de casse-cou et des solos rappelant le vieux Sepultura, ils captivèrent l’auditoire nombreux venu les entendre. Je fus donc très impressionné par la qualité des compositions, de l’interprétation et de la présence scénique de ces jeunes apparemment à peine sortis de la puberté. La formation sut aussi intégrer des passages plus lents et lourds pour permettre au public de digérer ses festivals du motif Speed Metal. Ce fut donc une seconde belle découverte pour moi en ce mardi soir et je peux affirmer que je ne fus pas le seul à être conquis par leur formule musicale alliant ancienne et nouvelle école du Thrash Metal tout en exploitant la virtuosité de ses jeunes membres.
Après les hors-d’œuvre, nous étions maintenant dus pour le premier plat de résistance de la soirée, soit une prestation des brutes sanguinaires de Vital Remains. En 27 ans d’histoire, la formation nous a habitués à des chefs-d’œuvre de Death Metal satanique à l’ancienne. Cependant, depuis les neuf dernières années, aucun nouveau matériel n’a été sorti par la formation et celle-ci a été ralentie par de nombreux changements de membres impromptus. D’ailleurs à son dernier passage à Québec en 2013, la formation avait du s’exécuter sans bassiste, celui-ci n’ayant pas passé les douanes et avec un guitariste soliste, Dean Arnold, qui venait à peine d’entrer dans le groupe. Pourtant, le concert avait été mémorable et puissant quand même. Cette fois, Vital Remains arrivait avec un alignement complet comprenant James Payne à la batterie, Gator Collier à la basse, Brian Werner au vocal et le seul et unique membre original de la troupe, Tony Lazaro à la guitare. Après une courte introduction, la troupe se lança dans une véritable leçon de Death Metal d’une énergie et d’une violence sans nom. La précision, la puissance sonore et le charisme furent au rendez-vous avec un chanteur escaladant les tables, sautant dans la fosse et courant sur les comptoirs pour haranguer un public possédé. Seule ombre au tableau, celui-ci semblait souvent être en avance sur le tempo dans la livraison de ses grognements gutturaux dévastateurs. Ce fut cependant un accroc très mineur dans une sévère correction livrée au public qui tournoyait dans une des plus grosses fosses circulaires que j’ai vues à L’Anti et ce, sans tenir compte du fait qu’on était un mardi. De plus, on eut même droit à un tsunami de la mort consistant en un «Wall of Death» entre le devant et le fond de la salle qui dévasta l’endroit. Une toute nouvelle pièce fut interprétée, signe que la disette de nouveau matériel est terminée pour Vital Remains. Après une «Dechristianize» magnifique, le groupe se retira ne laissant que des cadavres derrière et mettant toute la pression sur les épaules de Hate Eternal.
L’heure était donc venue pour le trio du légendaire guitariste-chanteur Erik Rutan (Ex-Ripping Corpse, ex-Morbid Angel, ex-Alas) de prendre d’assaut Québec après onze ans d’absence dans notre bourgade. De plus, sur la tournée actuelle, Hate Eternal avait l’honneur de s’amener avec Hannes Grossmann derrière les fûts, certainement un des batteurs les plus extraordinaires du Metal moderne. Enfin, malgré le fait que Hate Eternal est une force incroyable de Death Metal violent, brutal et technique sur album, ils ont souvent été moins bien évalués sur scène en raison de leur fâcheuse tendance à avoir un son flou et bourrin en concert. Après la prestation titanesque de Vital Remains, je craignais donc qu’ils se soient fait voler la vedette. Malheureusement, je n’étais pas loin de la vérité. Tout d’abord, malgré la présence de leur propre ingénieur du son derrière la console, on remarqua dès le début de leur prestation que le son était déficient. Tout d’abord, l’excès de déclencheurs automatiques sur la batterie noyait l’espace sonore de roulements de grosse caisse au son de machine à coudre. Ensuite, le reste du son était enterré dans les basses fréquences de la basse nous empêchant de distinguer clairement la guitare rythmique. Seuls les solos perçaient au-dessus de la bouillie sonore, probablement en raison de l’utilisation d’une pédale d’overdrive. Hormis le son, la prestation de Hate Eternal fut quand même puissante et divertissante malgré une sélection un peu inégale. Les spectateurs ne manifestèrent pas du tout le même enthousiasme que pendant Vital Remains et plusieurs semblèrent même déserter la salle. De surcroît, le bassiste J.J. Hrubovcak n’aurait pas dû être responsable des «backvocals» puisqu’il n’a tout simplement pas de voix et était toujours décalé par rapport au tempo. Le célèbre batteur session nous montra une facette différente de ses talents, lui qui nous a habitués, dans ses nombreux projets à un jeu plus dynamique et subtil, puisqu’avec Hate Eternal il est confiné au rôle de marteleur sans compromis. Cependant, je ne crois pas qu’il y soit mis en valeur en raison de l’abus de «triggers». Votre scribe resta donc sur sa faim même s’il fut quand impressionné par la virtuosité du trio.
En conclusion, il fut tout de même intéressant de voir Erik Rutan, une légende du Death Metal, s’exécuter avec Hate Eternal dans un contexte aussi intimiste que celui de L’Anti, mais Vital Remains leur aura donc bel et bien volé la vedette. Un son indéfini et une sélection en dents de scie auront handicapé les représentants de la haine éternelle. Le quintette sataniste aura donc servi une véritable leçon de Death Metal tant aux nombreux spectateurs qu’à la tête d’affiche. Enfin, je fis deux belles découvertes parmi les trois groupes de support, soit Black Fast et Vitiated. Ce fut donc une superbe soirée Metal. En terminant, je désire remercier District 7 Production pour l’accès média à la salle.
Louis-Olivier «Winterthrone» B. Gélinas