La première véritable bordée de neige est maintenant chose du passé. Ceci nous certifie deux choses : les espadrilles ont dû être remisées au profit des bottes et la fête de Noël approche. J’en vois déjà parmi vous qui sont un peu découragés car Noël n’est pas qu’une fête où l’on mange de la dinde et où on en profite pour boire une petite bière de trop sans se sentir coupable. Non. Noël, pour beaucoup de gens, c’est la grande aventure des achats de cadeaux. Afin de vous aider à vous en sortir, voici une liste de dix albums parus en 2013 que vous devriez placer sous le sapin pour le fan de métal dans votre famille. Si vous m’avez lu auparavant sur ce site, vous ne serez pas sans savoir que toute cette belle musique est accompagnée de voix féminines…
MÄRCHENBILDER, The Flickering Truth
À tout seigneur, tout honneur, je suis fier de vous recommander un produit québécois en début de liste. Märchenbilder (qui signifie « images de contes de fées ») est un groupe montréalais et tire son nom d’un opus du compositeur Robert Schumann. Dans cet esprit, il est donc assez logique que le résultat final soit très inspiré par la musique classique. The Flickering Truth est un album très riche au niveau musical, intégrant à merveille les instruments classiques à la panoplie d’instruments habituels utilisés dans le rock. Ainsi, violon et alto côtoient guitares et claviers pour nous amener dans de territoires rarement explorés en musique métal. La chanteuse Julie Bélanger Roy, dotée d’une puissante voix d’opéra, ajoute beaucoup de couleurs à la richesse musicale de l’ensemble en utilisant cette voix de manière variée tout au long de l’album. Le tout est un peu difficile d’approche en raison de sa grande complexité, mais lorsque l’on réussit à s’imprégner de la musique de Märchenbilder, il est impossible de ne pas être séduit.
AMBERIAN DAWN, Re-Evolution
Petite parenthèse dans la carrière du groupe finlandais, Re-Evolution est en fait une compilation de onze chansons tirées de leurs quatre premiers albums. Pourquoi acheter une compilation, alors? Parce qu’Amberian Dawn profite de ce contexte pour nous présenter sa nouvelle chanteuse, Capri, engagée pour remplacer la démissionnaire Heidi Parviainen. Le compositeur/claviériste Tuomas Seppälä a du même coup saisi la balle au bond pour réarranger certaines parties musicales. Le résultat est convaincant : les pièces d’Amberian Dawn paraissent plus denses musicalement et la voix de Capri se glisse parfaitement bien sur la grande majorité des titres. Bien sûr, cette transition ne s’est pas faite sans créer un débat de style Nightwish, c’est-à-dire que les fans en ont profité pour comparer la valeur d’une chanteuse rock (Capri) avec celle d’une chanteuse d’opéra (Parviainen). Verdict : les deux chanteuses sont différentes, mais excellentes. Re-Evolution est une belle occasion pour redécouvrir ce groupe sous-estimé. Un nouvel album de matériel original, Magic Forest, est prévu pour 2014.
ARVEN, Black is the Colour
Habituellement les groupes de métal à voix féminine ne comptent qu’une femme dans leurs rangs : la chanteuse. Chez Arven c’est le contraire, le groupe ne comprend qu’un seul homme dans sa formation : le batteur! L’effet est très particulier de voir une bande de filles faire du métal. En bon mélomane, on se doit toutefois d’éviter de tomber dans le piège de considérer ce groupe seulement pour des raisons de curiosité car les dames ont beaucoup de talent (j’en profite quand même pour avouer craquer pour la rouquine chanteuse Carina Hanselmann). Deuxième album de la formation allemande, Black is the Colour est encore une fois teinté d’une légère ambiance celtique que l’on retrouvait aussi sur leur première parution, Music of Light (2011). Toutefois cet aspect y est moins présent, ce qui rend la musique d’Arven moins originale même si elle demeure très avenante et entraînante. Voici donc un album qui, sans tout casser sur son passage, se révèle extrêmement agréable à l’oreille et marque une évolution certaine au plan de l’écriture, les compositions se faisant plus soignées et plus complexes.
DELAIN, Interlude
Le titre de ce quatrième album de Delain est très bien choisi. En effet, Interlude marque une transition pour le groupe néerlandais qui a profité d’un changement de maison de disques pour faire paraître ce recueil formé de nouvelles compositions (entre autres l’excellente Collars and Suits), de reprises, d’une pièce réenregistrée (une version ballade de We Are the Others) et de chansons en spectacle. La clé de cette parution est le deuxième disque, qui est en fait un DVD qui nous offre des vidéoclips, des images derrière la scène du groupe en tournée et, item le plus intéressant, cinq pièces filmées au Metal Female Voices Fest X en Belgique en 2012. Interlude n’est donc pas l’album idéal pour découvrir Delain, il est plutôt fait pour les fans (dont je suis) qui veulent mesurer l’évolution d’un groupe qui ne devait être au départ qu’un projet de studio et qui maintenant s’impose parmi les meilleurs de son genre.
EDENBRIDGE, The Bonding
Mine de rien, The Bonding est déjà le huitième album studio des Autrichiens. Voici un groupe qui n’a jamais progressé avec empressement mais qui s’est toujours concentré à donner plus de profondeur à son propos musical, bien marqué par les envolées lyriques et progressives de la guitare de Lanvall et bien identifiable par la voix paisible de Sabine Edelsbacher. The Bonding ne marque donc pas une révolution dans le petit monde d’Edenbridge, la seule variable étant que le groupe utilise de nouveau un orchestre symphonique, ce qu’il avait fait avec réussite sur le superbe MyEarthDream, paru en 2008. Edenbridge est possiblement le plus doux des groupes métal, offrant une musique chaleureuse sans une seule once d’agressivité qui plaira aussi aux fans de rock progressif (la pièce-titre, une perle de 15 minutes, est plus « prog » que métal). Rien de révolutionnaire, mais un album qui sait se faire aimer.
MAGION, A Different Shade of Darkness
Le deuxième album de ces Néerlandais est un des souvenirs qui a traversé l’Atlantique avec moi. Celui-ci a été lancé tout de suite après la performance inspirée que le groupe a offert au Metal Female Voices Fest. Comme je l’avais constaté en direct, les nouvelles compositions marquent une belle évolution par rapport à l’agréable Close to Eternity, publié en 2010. Les dix chansons, bien développées, laissent une belle place à des passages instrumentaux qui démontrent l’excellent niveau des musiciens. Ce sont les claviers qui se taillent la part du lion, donnant une sonorité très symphonique à l’ensemble, la guitare s’affirmant surtout sur les susnommées séquences instrumentales. Derrière le micro, la chanteuse Myrthe van Beest, avec sa voix rappelant un peu Liv Kristine de Leaves’ Eyes, est impeccable et complète parfaitement bien le travail de ses collègues. L’amélioration la plus notoire se situe au niveau de la production : n’étant pas tout à fait au point sur le premier-né du groupe, elle est ici très solide et permet à l’auditeur d’apprécier toutes les forces de cet album qui mérite de nombreuses écoutes.
REVAMP, Wild Card
Groupe formé par la chanteuse Floor Jansen suite à la séparation d’After Forever, ReVamp nous a offert cette année son deuxième album, Wild Card. Misant sur une formule similaire à celle d’After Forever, ReVamp présente des séquences hautement mélodiques, mais mise surtout sur les séquences plus rudes, permettant à Floor Jansen d’explorer davantage le côté agressif de sa voix. Étant capable de chanter de l’opéra de manière impressionnante comme vous pourrez le constater en cliquant ce lien, elle démontre sur Wild Card qu’elle peut chanter avec rage, voire même avec hargne, en chantant elle-même des parties de grunt; je me suis vraiment laissé prendre en croyant que c’était un homme qui poussait ces notes! Dans le rayon du grunt, on peut aussi entendre les invités Mark Jansen d’Epica (aucun lien de parenté avec Floor) et Devin Townsend. Musicalement le tempo est rapide, les musiciens ne chômant pas sur leurs instruments. Avec toute cette intensité, autant vocale que musicale, on s’en sort avec une écoute lourde et essoufflante, mais très satisfaisante.
SERENITY, War of Ages
Depuis sa parution en mars, je crie sur tous les toits que War of Ages est l’album de l’année. Laissez-moi profiter des dernières semaines de 2013 pour le faire de nouveau. Sur la forme, ce quatrième album des Autrichiens n’est pas bien différent de leur précédent, Death & Legacy. Au niveau du propos, nous avons donc de nouveau droit à une leçon d’histoire, les paroles tournants autour de différents personnages ou événements historiques. La musique du groupe est toujours hautement symphonique et entraînante, la guitare et les claviers prenant tour à tour la vedette, le tout bien complété par une section rythmique lourde et efficace. La nouveauté que nous offre Serenity, c’est l’ajout d’une chanteuse à son arsenal. Venant surtout supporter le travail de son acolyte masculin Georg Neuhauser, la Française Clémentine Delauney ajoute toutefois une belle richesse à l’ensemble (difficile d’imaginer Royal Pain, The Matricide ou Wings of Madness sans elle), sa voix étant perceptible tout au long de ce parcours sans faute. Du grand art.
TOTHEM, Beyond the Sea
Depuis la nuit des temps, je fais l’apologie de la barre de droite sur YouTube. Cette dernière m’a permis de faire de très agréables découvertes, y compris celle de ce groupe italien. Existant depuis 2003, Tothem avait deux mini-albums sous la cravate (Tothem en 2003 et Osaka Bed & Breakfast en 2010) avant d’enfin publier son premier album complet cette année. Beyond the Sea nous présente un groupe bien en contrôle, la cohésion entre les instrumentistes étant impeccable. Misant sur le format court, les pièces sont bien musclées, soutenues et transportées par des riffs de guitare efficaces. La musique, fort intéressante, est toutefois élevée vers le haut par la très jolie voix de Roslen Bondi. Cette dernière, ayant un registre très étendu, sait utiliser ses capacités de façon appropriée, chantant tantôt de façon puissante, tantôt avec plus de retenue afin d’amener une belle variété dans nos oreilles. Bref, elle ne tombe pas dans le piège de vouloir toujours pousser la plus haute note, fâcheuse habitude qui peut rebuter certains mélomanes qui tentent de s’initier au métal à voix féminines.
TARJA, Colours in the Dark
Preuve que le temps passe vite, Tarja Turunen n’est plus la chanteuse de Nightwish depuis huit ans déjà! Colours in the Dark est le troisième album solo de la Finlandaise, et sans aucun doute son plus réussi. Tout en continuant à mélanger les genres, Tarja semble avoir mieux cerné son créneau, la force de ce nouvel opus étant surtout sa plus grande homogénéité. On a donc affaire à un rock mélodique où se côtoient à merveille des compositions plus musclées et d’autres plus atmosphériques. Le tout, bien produit, coule de source et permet surtout de mettre en vedette la voix typique et reconnaissable de la dame qui est entourée d’une solide équipe de musiciens. Si, sur Colours in the Dark, on ne retrouve pas la grandiloquence de la musique de son ancien groupe, on peut quand même cerner des passages hauts en couleurs, particulièrement sur la magnifique Deliverance, de loin la plus symphonique des pièces de sa deuxième carrière. On sent donc une belle progression sur chaque album, ce qui nous donne déjà hâte de savoir comment sonnera l’étape suivante.
Au moment d’écrire ces lignes, je suis en train de jeter l’oreille sur Symphonies of the Night, le nouvel album de Leaves’ Eyes, et le nouveau Blu Ray de Nightwish est sur le point d’aboutir dans ma boîte aux lettres. Nul doute que j’aurai la chance au cours de la prochaine année de vous entretenir de ces parutions car certaines personnes chez Ondes Chocs semblent vouloir me voir contribuer de nouveau ici (merci pour votre confiance, les amis!). Ma modeste contribution pour tenter de vous inciter à consommer pour faire rouler l’économie étant faite, il ne me reste plus qu’à vous souhaiter un joyeux temps des Fêtes. Amusez-vous bien et surtout montez le son car c’est Noël et vos voisins ne pourront pas vous blâmer pour la musique forte!
Stephan
Critiques intéressantes et qui donnent le goût de découvrir les groupes et albums présentés. On voit clairement que le chroniqueur connaît son affaire !! 😉
Merci Danny pour ton commentaire. C’est très apprécié.
Je sais Stéphane que tu n’es pas un fan de Peter Gabriel. Mais moi je le suis, et je sais depuis son interview sur le DVD Act 1, que Tarja l’est aussi. Et quel superbe hommage elle lui rend ici en reprenant ici son Darkness.
Effectivement c’est un bel hommage et sa version de Darkness est bien réussie. Si j’avais écrit une critique plus exhaustive de son album, j’en aurais fait mention. Ce Colours in the Dark est un bon album et cette reprise se faufile bien dans son matériel original.