La Taverne Metal Noir
Lorsqu’une éclipse solaire frappe le nord de l’Europe le jour de l’équinoxe du printemps, c’est signe que la fortune sourira aux légions de l’ombre. Ce présage était d’autant plus encourageant que les amateurs de métal noir québécois de la Capitale nationale souffraient d’une quasi-disette de rituels sombres depuis environ un an. C’est ainsi que Julie Bernier décida de remédier à cette situation en organisant une représentation dédiée à ce genre dans le cadre de ses déjà fameuses «Tavernes Métal». Pour la très modique somme de six douleurs, les fanatiques auraient donc droit à une trinité de formations émergentes de Québec qui s’exécuteraient pour la toute première fois devant public, soit: Eos, Saturanles et L’Astre Sélène. De plus, la soirée serait couronnée par le retour sur scène des virtuoses d’Acédia qui nous présenteront sous peu leur second album en carrière. Il était donc totalement hors de question que votre fidèle serviteur manque cette obscure orgie musicale et c’est avec empressement que ce dernier se libéra de toutes obligations professionnelles et se dirigea vers l’Agitée avec sa fidèle succube tentatrice.

Après avoir eu brièvement le temps de saluer les nombreux piliers de taverne déjà présents et de s’abreuver à la fontaine de sagesse, l’obscurité tomba dans la salle et L’Astre Sélène prit place sur scène. Peu d’informations ont pu être ramassées sur ladite formation, mais je pus constater qu’il s’agit d’un duo composé d’une guitariste et d’un batteur-chanteur qui pratique un Black Metal atmosphérique aux forts accents introspectifs et dépressifs. Leur musique telle que présentée sur scène fut donc un assemblage de motifs de guitare cycliques alternant entre agressivité et douceur mélancolique. Bien que leur présence scénique se fit plutôt réservée comme le veut le genre musical choisi, les deux protagonistes donnèrent une très belle performance, notamment le batteur-chanteur avec son jeu précis et varié. La guitariste quant à elle nous démontra bien son potentiel, malgré sa posture renfermée et son instrument qui sonnait malheureusement parfois mal accordé. En somme, ce fut donc une belle entrée en matière pour la soirée et une bonne première fois pour la virginale formation.

La seconde formation à s’amener sur scène était Saturnales, projet métal noir à forte tangente Doom en gestation depuis environ quatre ans. Accompagné de projections du film «Excalibur» (1981) ainsi que d’interludes sur bande sonore, le groupe livra ses compositions avec conviction et un talent certain. Malgré quelques imprécisions mineures tout à fait normales pour une première prestation devant public le groupe réussit facilement à garder le cap et à transmettre l’atmosphère voulue au public. Les réactions des nombreux spectateurs à la prestation de Saturnales furent d’ailleurs empreintes d’enthousiasme, ce qui est un très bon indicateur de la réussite de leur premier passage sur scène. La dernière pièce livrée par le groupe, composée par Rudy, un personnage connu de la scène souterraine de Québec décédé l’automne passé et qui faisait jadis partie de la formation, fut d’ailleurs tout simplement magique avec une ligne de basse lourde typiquement Doom et une puissance émotive hors du commun. On attend donc avec impatience un enregistrement de la part de Saturnales.

La troisième formation à prendre la scène d’assaut serait Eos, un trio sur enregistrement s’incarnant en quatuor sur scène avec l’ajout d’Atheos (Monarque, Délétère) à la deuxième guitare. Le groupe a sorti une cassette l intitulée «L’Avalé» en 2014 qui présente un Black Metal atmosphérique puissant. Cette sortie comportant trois pièces était limitée à 150 copies déjà toutes vendues, ce qui est un bon indicateur de la qualité musicale de la formation. Sur scène la troupe démontra un excellent aplomb menant les spectateurs dans les spirales des motifs de guitare hypnotiques de G. (Wendess, Délétère (live)) et d’Atheos, alors que K. (batterie, chant) nous livra une performance impressionnante malgré un pied de micro non coopératif. Les spectateurs furent visiblement impressionnés par le mur sonore créé par Eos dans une prestation pratiquement sans faille. Je vous invite donc à suivre les activités de cette nouvelle formation de chez nous qui devrait nous livrer une seconde sortie cette année.

 

 

C’était maintenant au tour d’Acédia de venir couronner la soirée pour leur première tête d’affiche en carrière. Le quatuor de Québec s’est fait remarquer chez les amateurs de Black Metal musicalement élaboré depuis la sortie de son premier album «L’Exil» (2012). De plus, la troupe a déjà enregistré son second album intitulé «Les supplices de l’apathie» qui devrait paraître incessamment et dont il est possible d’écouter un extrait intitulé «L’apogée de l’amertume».

 

 

Fidèle à son habitude, Acédia nous assomma rapidement et efficacement avec une sélection combinant de nouvelles pièces et des tubes de son premier album. La réaction de la foule ne se fit pas attendre avec de belles démonstrations de violence misanthropique dans la fosse. Si la troupe nous a habitués à des prestations musicalement impressionnantes, je pus remarquer que les membres du groupe ont de plus en plus d’aisance du côté du dynamisme de leur présence scénique, ce qui est tout à leur avantage. En somme, leur spectacle ne laissa personne indifférent et démontra qu’Acédia méritait incontestablement sa place en tête d’affiche de cette soirée.

En conclusion, la «Taverne Métal Noir» du 20 mars fut une réussite sur toute la ligne et nous fait déjà regretter la fermeture de l’Agitée le 30 juin prochain. En effet, les amateurs de métal noir furent au rendez-vous, les artistes livrèrent la marchandise et le son, régi par François C. Fortin, fut excellent toute la soirée. Un gros merci à Julie Bernier pour son travail d’organisation et pour le prix d’entrée très concurrentiel! La prochaine «Taverne Métal» sera une cabane à sucre et aura lieu à l’Agitée le vendredi 17 avril 2015, soyez-y!

Louis-Olivier «Winterthrone» B. Gélinas